En Côte d’Ivoire, le paysage politique connaît un tournant avec la décision du Front Populaire Ivoirien (FPI) de rompre définitivement ses liens avec le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). Après un partenariat d'un an et demi marqué par des désaccords latents, le parti dirigé par Pascal Affi N’Guessan prend officiellement ses distances avec la formation politique au pouvoir, accusant cette dernière de trahir l’esprit de leur collaboration.
Un accord sans résultats tangibles
Le partenariat entre le FPI et le RHDP, scellé en mai 2023, devait marquer une nouvelle ère de coopération dans le cadre de la réconciliation nationale.
Toutefois, selon le FPI, cet engagement n’a produit aucun effet concret. Le comité central du FPI a récemment qualifié l’accord de « caduc et sans objet », soulignant l’absence d’initiatives communes.
Malgré les tentatives du FPI pour relancer le processus, comme la proposition d’organiser un séminaire sur la réconciliation, ces initiatives n’ont reçu aucun écho favorable de la part du RHDP.
Pour Pascal Affi N’Guessan, ce manque de volonté de coopération démontre que le RHDP n’a jamais véritablement cherché à soutenir un projet de réconciliation nationale, préférant privilégier ses intérêts politiques au détriment de la paix sociale.
« Nous étions engagés à œuvrer ensemble pour la stabilité du pays, mais aucune action n'a été menée en ce sens », a-t-il déclaré, visiblement amer face à ce qu’il perçoit comme une occasion manquée.
La fracture des élections locales
Les élections municipales et régionales de septembre 2023 ont marqué un point de rupture dans les relations entre les deux formations politiques.
Le FPI reproche au RHDP de ne pas avoir respecté les termes implicites de leur entente, notamment en matière de soutien électoral.
En conséquence, le FPI a subi d’importantes pertes, notamment la mairie de plusieurs localités ainsi que la présidence du Conseil régional du Moronou, fief historique de Pascal Affi N’Guessan.
Ces défaites ont été perçues comme un véritable affront pour le FPI, qui estime que le RHDP a volontairement œuvré contre ses intérêts lors de ces scrutins.
« C’est un coup dur pour notre parti. Nous avons perdu cinq sièges entre 2018 et 2024, tous pris par le RHDP, en dépit de notre alliance.
Ce comportement révèle un appétit démesuré pour le pouvoir de la part du RHDP, qui n’hésite pas à sacrifier ses partenaires pour renforcer son emprise », a confié Affi N’Guessan.
La réponse du RHDP : une simple cohabitation
De son côté, le RHDP semble relativiser l’ampleur de cette rupture. Kobénan Kouassi Adjoumani, porte-parole du parti, a affirmé que l’accord entre les deux partis n’était pas une alliance formelle mais plutôt une « cohabitation temporaire ».
Selon lui, l’échec du FPI aux élections locales ne relève pas d’un manque de soutien du RHDP, mais plutôt d’une mauvaise organisation interne au sein du parti de Pascal Affi N’Guessan.
Il a même ajouté que le RHDP avait proposé son aide à plusieurs reprises, mais que celle-ci n’avait pas été acceptée.
Un avenir incertain pour le FPI
Avec cette rupture, le FPI se retrouve à un carrefour politique. Le parti doit désormais redéfinir sa stratégie alors que se profilent de nouveaux enjeux, notamment la présidentielle de 2025.
Affi N’Guessan, affaibli par les récentes déconvenues électorales, entend néanmoins maintenir le cap et repositionner son parti sur l’échiquier politique.
Le congrès prévu en novembre 2024 à Yamoussoukro sera l’occasion pour le FPI de clarifier sa direction, notamment en ce qui concerne les alliances futures et la désignation de son candidat pour la prochaine élection présidentielle.
Ce congrès intervient alors que l’opposition ivoirienne est en pleine recomposition.
L’appel lancé en juillet 2024 par Laurent Gbagbo, figure emblématique du FPI et désormais leader du PPA-CI à un rassemblement des forces de l’opposition, a été accueilli favorablement par une partie des militants.
Si Affi N’Guessan a pour l’instant maintenu une certaine distance vis-à-vis de cette proposition, il n’a pas exclu la possibilité de rejoindre une plateforme unie de l’opposition, estimant que « le moment opportun » viendra pour se prononcer.
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