Guinée : Toumba candidat depuis sa cellule, Doumbouya se renie
- Towanou Johannes
- 3 days ago
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L’ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara, Aboubacar Sidiki Diakité, alias Toumba Diakité, crée la surprise.
Toujours détenu à la maison centrale de Conakry, il a officiellement payé sa caution présidentielle pour le scrutin du 28 décembre 2025.
Le montant de 900 millions de francs guinéens, exigé pour tout candidat, a été intégralement versé selon des documents cités par Guinéenews.
Toumba Diakité, aujourd’hui détenu dans le procès du massacre du 28 septembre 2009, entend se présenter sous la bannière du Parti pour la Réconciliation et du Travail (PRT).
Une démarche symbolique et inédite dans l’histoire politique guinéenne, puisqu’il s’agit de la première fois qu’un candidat incarcéré dépose officiellement sa caution pour briguer la magistrature suprême.
Un homme de devoir derrière les barreaux
Malgré son statut de détenu, Toumba Diakité n’a jamais cessé de se présenter comme un homme d’honneur.
Dans ses rares prises de parole, il s’est toujours dit « prêt à servir la vérité et la réconciliation » dans un pays encore marqué par les fractures du passé.
Sa candidature, au-delà du geste politique, interpelle sur la crédibilité et la portée symbolique du scrutin à venir.
Des doutes sur la véracité de la candidature
Cependant, de nouvelles informations viennent nuancer cette annonce.
Selon une enquête d’Africaguinee.com, ni la famille ni la défense de Toumba Diakité n’ont confirmé le dépôt de sa candidature.
Son père, le doyen Mamadi Diakité, a confié : « C’est ma première nouvelle. Je ne suis pas au courant de sa candidature. »
De son côté, l’un de ses avocats, Maître Lancinet Sylla, s’est montré très réservé, déclarant : « Je le gère en tant que client, je ne peux ni infirmer, ni confirmer sa candidature. »
Toumba Diakité purge actuellement une peine de dix ans de prison, prononcée le 31 juillet 2024, après avoir été reconnu coupable de crimes contre l’humanité dans le cadre du procès du massacre du 28 septembre 2009.
Ce statut de condamné soulève une question juridique majeure : une personne reconnue coupable de tels faits peut-elle légalement déposer sa candidature, même si la caution a été effectivement versée ?
Doumbouya aussi candidat : le serment trahi

Ce rebondissement survient dans un contexte politique déjà tendu.
Le général Mamadi Doumbouya, actuel chef de la transition, a lui aussi déclaré sa candidature à cette élection, rompant ainsi avec l’engagement qu’il avait solennellement pris devant le peuple guinéen : ni lui, ni aucun membre du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) ne devaient se présenter à un quelconque scrutin post-transition.
Cette volte-face, perçue par beaucoup comme une trahison, s’ajoute à une série de reniements qui installent le doute sur la sincérité du processus démocratique.
Pour plusieurs observateurs, la Guinée s’enfonce dans une habitude militaire où le mensonge devient une stratégie de gouvernance.
Les Forces Vives de Guinée rejettent Doumbouya et appellent à la mobilisation
À peine la candidature du général Doumbouya déposée, la réaction des Forces Vives de Guinée ne s’est pas fait attendre.
Dans une déclaration ferme, ce regroupement de partis, syndicats et organisations de la société civile a dénoncé un « parjure », accusant le président de la transition d’avoir trahi la Charte de la Transition et ses engagements solennels pris devant Dieu, la Cour suprême, le peuple et la communauté internationale.
Les Forces Vives estiment que cette candidature « marque un tournant funeste dans l’histoire du pays », transformant celui qui se disait restaurateur de la démocratie en « fossoyeur de la République ».
Elles rappellent que l’article 46 de la Charte de la Transition interdit explicitement au président et aux membres du CNRD de se présenter à tout scrutin organisé pour marquer la fin de la transition, et que l’article 25, alinéa 4 de la Charte africaine de la démocratie stipule que les auteurs de changement anticonstitutionnel ne doivent participer à aucune élection de restitution de l’ordre démocratique.
Dans ce communiqué au ton grave, les Forces Vives appellent à une mobilisation nationale, « dans la dignité et la détermination », pour « contrecarrer, par tous les moyens, la volonté de Mamadi Doumbouya de détruire les acquis démocratiques obtenus de haute lutte ».
Une présidentielle à haut risque
Entre la candidature surprise de Toumba Diakité et celle controversée du général Doumbouya, la tension politique monte à Conakry.
A cela s'ajoute l'exclusion de la quasi-totalité des poids lourds de l'opposition dont Cellou Dalein Diallo de l'UFDG.
Les Forces Vives de Guinée dénoncent un climat d’exclusion et un durcissement des conditions électorales.
La Cour suprême doit encore publier la liste définitive des candidats avant le 13 novembre, mais le ton est déjà donné : la présidentielle du 28 décembre s’annonce comme l’une des plus explosives de l’histoire politique guinéenne.









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