Mercredi 3 septembre, les jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim), affiliés à al-Qaïda, ont mis leur menace à exécution.
Après plusieurs avertissements lancés début juillet, ils ont officiellement décrété un blocus total des villes de Kayes et Nioro du Sahel, dans le sud-ouest du Mali, non loin des frontières avec le Sénégal et la Mauritanie.
Le signal a été donné par un coup de force : l’interception de véhicules près de Nioro, suivie de l’enlèvement de proches du chérif Bouyé Haïdara, figure religieuse majeure du pays.
Deux adolescents membres de sa famille ainsi que deux chauffeurs figurent parmi les otages.
Les jihadistes sont repartis avec deux 4x4 appartenant au chérif.
Un message clair : frapper au cœur symbolique et religieux
Le choix de cibler directement le chérif de Nioro n’est pas anodin.
Déjà en janvier 2025, le Jnim avait revendiqué l’enlèvement de Thierno Amadou Hady Tall, un autre chef religieux de Nioro, dont la mort reste entourée de zones d’ombre.
Cette fois, l’attaque contre Bouyé Haïdara résonne comme un avertissement au clergé musulman influent du Mali.
Incendies et propagande jihadiste
Dans la soirée du 3 septembre, le Jnim a diffusé des vidéos de propagande confirmant l’opération et annonçant officiellement le blocus.
Sur le terrain, des camions ont été incendiés entre Kayes et Nioro, confirmant la volonté des jihadistes de couper les routes.
Leur menace la plus lourde de conséquences : interdire toute importation de carburant venant du Sénégal, de la Mauritanie, de la Guinée ou de la Côte d’Ivoire.
Ils visent également des compagnies de transport, dont Diarra Transports, accusée de collusion avec les autorités de transition.
Une stratégie d’asphyxie nationale
Selon un rapport du Timbuktu Institute publié en avril 2025, cette stratégie vise à étouffer Bamako.
La capitale dépend largement de l’approvisionnement par la route de Kayes, artère économique essentielle.
En s’attaquant à cette zone, le Jnim cherche à paralyser le pays au-delà du Sahel occidental.
Les précédentes attaques de juillet, menées sur les frontières sénégalaise et mauritanienne, avaient déjà montré la volonté des jihadistes de punir les populations accusées de soutenir l’armée malienne.
Des offensives d’envergure et libération d’otages
Au lendemain des enlèvements et de l’annonce du blocus, l’absence de réaction officielle avait renforcé les craintes des populations de Kayes et de Nioro.
Mais cette période de silence a rapidement cédé la place à une contre-offensive militaire majeure.
Selon des sources sécuritaires locales et un communiqué de l’État-major, les Forces armées maliennes (FAMa) ont mené plusieurs opérations simultanées.
Dans la région de Kayes, incluant les cercles de Diéma et Nioro du Sahel, des frappes aériennes ciblées ont permis de neutraliser des combattants jihadistes et de détruire des bastions terroristes.
Des otages retenus dans des conditions difficiles ont été libérés, immédiatement pris en charge puis conduits vers une zone sécurisée.
Parallèlement, une frappe aérienne a visé un pick-up suspect à In Delimane, près de Tessit.
L’explosion a révélé la présence de substances inflammables, confirmant la préparation d’actions hostiles.
L’opération a également permis la saisie d’un important arsenal de guerre, infligeant un revers majeur aux Groupes armés terroristes (GAT).
Cette double offensive illustre la détermination des FAMa à porter la guerre au cœur des zones où les jihadistes tentent d’imposer leur loi, envoyant un signal fort : la menace, même à Kayes, ne restera pas sans réponse.
Un risque régional toujours présent
Malgré ces succès militaires, la zone de Kayes reste fragile. Située aux frontières du Sénégal et de la Mauritanie, elle demeure stratégique pour les échanges commerciaux et l’approvisionnement du Mali.
Si le blocus jihadiste venait à s’installer durablement, il pourrait affecter non seulement l’économie malienne mais aussi les flux transfrontaliers, amplifiant l’instabilité régionale.
Ainsi, les récentes frappes et libérations d’otages constituent une victoire tactique, mais la lutte s’inscrit dans la durée : entre le Jnim et l’armée malienne, le bras de fer se joue désormais sur des routes vitales pour tout le pays.
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