Le 23 mai 2025, le camp militaire de Dioura, dans la région centrale de Mopti, est tombé entre les mains des jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim), affilié à al-Qaïda. Selon des sources sécuritaires locales, 41 soldats maliens ont été tués dans cette attaque fulgurante. Le chef de camp et son adjoint figurent parmi les victimes. Des vidéos insoutenables diffusées par les assaillants confirment l’ampleur du drame : des dizaines de corps, un camp pillé, incendié, et des véhicules militaires emportés.
Attaque éclair, absence de renforts, repli tardif
Les jihadistes ont lancé leur offensive avant 14h. Après avoir conquis le camp, ils s’y sont installés jusqu’à la nuit tombée, sans aucune réaction militaire notable.
Pire, selon des habitants de Dioura, les assaillants auraient effectué plusieurs allers-retours dans le camp et la ville tout au long de la journée du samedi.
Aucun renfort n’est intervenu pour soutenir les soldats en détresse. Ce n’est que le dimanche que des éléments de l’armée sont arrivés sur place, trop tard pour changer le cours des événements.
Un silence officiel qui interroge
À ce jour, l’armée malienne n’a publié aucun communiqué concernant l’attaque de Dioura.
Sollicitée par RFI, elle n’a donné aucune réponse. Le seul message émanant de l’état-major date du 24 mai et concerne une opération menée près de Sofara, toujours dans la région de Mopti, où plusieurs terroristes auraient été neutralisés.
Rien, cependant, sur le massacre de Dioura, alimentant les interrogations sur la transparence et la stratégie de communication des autorités militaires.
Un signal d’alarme pour le pouvoir
Cette attaque, parmi les plus meurtrières de l’année, illustre à nouveau la vulnérabilité des positions militaires maliennes dans le centre du pays.
« Il y avait eu des alertes, mais la hiérarchie a été trop négligente », confie une source sécuritaire malienne.
Ce constat, amer, traduit un sentiment d’abandon parmi les troupes sur le terrain.
Les soldats tués à Dioura n’ont ni été secourus, ni appuyés par des frappes aériennes. Leur sacrifice, pour l’instant, reste sans reconnaissance officielle.
Dioura, cible récurrente
Ce n’est pas la première fois que le camp militaire de Dioura est visé. Il avait déjà été attaqué par les rebelles du CSP (Coalition des mouvements de l’Azawad) un an et demi auparavant.
Sa situation géographique en fait un point stratégique, mais aussi une cible fragile.
En l’absence d’une présence militaire dissuasive et de renforts rapides, ce poste reste à la merci des groupes armés.
L’autre front : Soumpi sous les drones du FLA
Quelques heures seulement après le drame de Dioura, c’est le camp militaire de Soumpi, dans la région de Tombouctou, qui a été visé par une attaque au drone, cette fois revendiquée par les rebelles indépendantistes du FLA (Front de libération de l’Azawad).
Si aucun bilan officiel n’a encore été communiqué, cette offensive souligne la multiplication des foyers d’insécurité à travers le pays.
Une guerre asymétrique face à un État affaibli
Les événements de Dioura et de Soumpi montrent que les forces maliennes sont confrontées à une guerre asymétrique qu’elles peinent à contenir.
Djihadistes et groupes rebelles exploitent les failles logistiques, les lenteurs hiérarchiques et le manque d’anticipation pour imposer leur rythme.
La multiplication de ces attaques, dans un silence institutionnel pesant, affaiblit non seulement la position de l’armée, mais aussi la confiance de la population envers ses dirigeants.
Urgence de réagir, besoin de vérité
Le Mali est à un tournant. La répétition des attaques, l’absence de réponses rapides et l’omerta sur les pertes humaines deviennent des facteurs de démoralisation.
Face à cette hémorragie sécuritaire, l’État doit agir avec clarté, force et transparence.
L’attaque de Dioura ne doit pas rester un simple fait divers de guerre : elle doit être un signal d’alarme.
Pour l’armée. Pour les autorités. Et pour un peuple qui attend des actes à la hauteur de ses sacrifices.
Comments