Jean-Baptiste Placca : le dernier mot d’un témoin lucide de l’Afrique

Jean Baptiste Placca

Après dix-huit années de présence continue sur RFI, Jean-Baptiste Placca a tiré sa révérence dans un éditorial qui sonne comme une déclaration d’amour, mais aussi comme un avertissement à un continent qu’il n’a jamais cessé de scruter avec franchise. Pour son ultime rendez-vous, le chroniqueur a choisi de rompre avec la tradition : pas de questions préliminaires, mais une entrée en scène directe, solennelle, presque théâtrale. Un adieu maîtrisé, à son image.

Une fiction… trop crédible pour être irréelle

Placca ouvre son dernier édito par un récit troublant. Au cœur de la nuit, le Palais présidentiel devient le théâtre d’un ballet de 4×4 lustrés, de ministres anxieux, de dignitaires fébriles.

Les rumeurs enflent dans la capitale. La télévision nationale annonce un événement majeur.

Puis vient l’image attendue : le président, grave mais serein, prend la parole.

Et soudain, l’impensable : il reconnaît sa défaite. Il félicite publiquement son challenger, ancien ministre devenu vainqueur du scrutin.

La liesse éclate dans tout le pays, les foules envahissent les rues, les sept collines répercutent les cris de joie, comme lors d’une victoire des Lions Indomptables.

Mais Placca tranche : oui, c’est un rêve. Une fiction qui dit pourtant quelque chose de profondément vrai sur l’Afrique, ce continent « du pire et du meilleur ».

Le pire, selon lui, ne manque jamais son rendez-vous. Mais le meilleur, lui, surgit parfois au moment le plus improbable.

Un miroir tendu au Cameroun et au continent

À travers ce scénario imaginaire, Placca pointe ce qu’il nomme « les certitudes d’espérance ».

Une manière de dire que croire au sursaut démocratique n’est ni naïveté ni faiblesse.

Il évoque Paul Biya, au pouvoir depuis plus de quarante ans, et estime qu’un geste d’apaisement, un acte de vérité, pourrait le réconcilier avec une partie du peuple.

Un propos audacieux, mais fidèle à son style : lucide, franc, parfois tranchant, mais jamais désespéré.

Le message d’un homme qui a choisi de croire

Pour ce dernier éditorial, Placca n’a pas seulement livré une analyse politique.

Il s’est confié. Il a remercié ses auditeurs, ceux qui l’ont applaudi comme ceux qui l’ont critiqué.

Il a rappelé que son rôle n’a jamais été de flatter, mais d’alerter, d’accompagner, de questionner.

« Je viens de vous, je vais vers vous », dit-il. Une phrase qui résume sa posture : celle d’un homme enraciné dans son continent, mais lucide sur ses failles ; d’un journaliste qui refuse de renoncer à l’espérance même lorsque « sombre toute joie ».

Un retrait qui marque la fin d’une époque

Le départ de Jean-Baptiste Placca ne ferme pas seulement une chronique : il clôt une manière singulière de dire l’Afrique.

Pendant dix-huit ans, sa voix a accompagné les bouleversements politiques, les crises, les illusions perdues, les renaissances inattendues.

Son ton, mêlant rigueur, poésie et gravité, a fait de lui une référence.

Son dernier édito, construit comme une parabole politique, rappelle une chose : l’Afrique n’est jamais totalement prisonnière de son passé.

Elle peut surprendre. Elle peut se relever. Elle peut même, parfois, dépasser ce que l’on croyait possible.

Jean-Baptiste Placca s’en va, mais la question qu’il laisse en suspens demeure : et si ce rêve-là, un jour, cessait d’être une fiction ?

Une question à laquelle j'ajoute volontiers celle-ci : qui dans votre pays peut prendre la relève de Jean-Baptiste Placca?

Dites nous dans les commentaires ce que vous pensez de ses chroniques et de ceux qui pourraient lui emboîter le pas selon vous et pourquoi ?