Constant Mutamba / Ministre de la justice, acclamé par ses partisans
L’image est forte, presque surréaliste : ce mardi 3 juin, le ministre de la Justice Constant Mutamba a été porté en triomphe à la sortie de la Cour de cassation, entouré d’une marée humaine de partisans venus l’accompagner. Un geste hautement symbolique dans un climat de tension politico-judiciaire grandissant.
Une comparution sous haute attention
Convoqué par le procureur général près la Cour de cassation, Constant Mutamba s’est présenté dans le respect de la procédure.
Mais loin d’une arrivée discrète, c’est une véritable démonstration de force que le ministre a orchestrée.
Précédé de chants et d’ovations, escorté par ses soutiens jusque dans l’enceinte judiciaire, le ministre est apparu serein et déterminé.
Dans un contexte où la justice et la politique se frôlent dangereusement, l’image du ministre de la Justice, bras levé au milieu d’une foule chauffée à blanc, en dit long sur sa stratégie : se poser en homme du peuple injustement ciblé.
Une tension judiciaire qui vire au bras de fer politique
Accusé d’avoir engagé une procédure irrégulière dans un contrat public de 19 millions de dollars, Constant Mutamba fait face à des poursuites judiciaires engagées à la demande du procureur Firmin Mvonde.
Les fonds en question proviendraient d’un mécanisme spécial d’indemnisation des victimes de guerre dans l’Est de la RDC.
Mais cette procédure intervient dans un conflit plus profond entre les deux hommes.
En novembre 2024, à peine nommé ministre, Mutamba avait déclenché une enquête visant Mvonde dans une affaire d’acquisition immobilière suspecte.
Depuis, les échanges sont devenus de plus en plus virulents. Le 26 mai dernier, Mutamba a publiquement accusé le procureur de faire partie d’un « groupe de mafieux » cherchant à l’humilier.
Son cabinet avait, dès le 11 mai, qualifié l’affaire de « détournement imaginaire et fictif ».
La ligne de défense du ministre
Déjà entendu par une commission parlementaire, Constant Mutamba avait reconnu des « erreurs administratives » dans la procédure de passation de marché, sans obtenir l’avis préalable de la DGCMP.
Il avait alors présenté ses excuses à l’Assemblée nationale, tout en soulignant que ces faits relèvent d’un litige administratif et non pénal.
Un argument qu’il a réitéré devant le parquet général, d’où il est ressorti libre à l’issue de son audition.
C’est l’avocat général Sylvain Kaluila qui a procédé à son audition ce 3 juin. Mais, il devra revenir vendredi pour la poursuite de l’instruction, apprend-on.
Une sortie triomphale
À l’issue de cette convocation très médiatisée, le ministre ne s’est pas éclipsé par une porte dérobée.
Souriant, saluant la foule, il a été littéralement porté par ses soutiens, dans une scène rare dans le paysage institutionnel congolais.
Cette mise en scène spectaculaire vise à envoyer un message clair : Mutamba ne se laissera pas abattre, ni politiquement, ni moralement.
Un feuilleton qui ne fait que commencer
Cette apparition triomphale pourrait bien avoir des répercussions profondes.
Pour certains, elle marque le début d’un affrontement frontal entre le pouvoir judiciaire et une partie de l’exécutif.
Pour d’autres, elle révèle un ministre en quête de légitimation populaire face à une justice perçue comme instrumentalisée.
Dans tous les cas, l’affaire Mutamba prend une tournure aussi politique que judiciaire.
Le peuple s’en mêle. La rue s’invite dans les palais de justice. Et le bras de fer s’intensifie.
À suivre : la décision finale de la commission parlementaire sur la levée de l’immunité, les suites de la procédure judiciaire, et les équilibres fragiles au sein du gouvernement de Judith Suminwa.
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