
Les Assises nationales du Niger ont récemment validé un prolongement de la transition pour cinq ans, avec la possibilité pour le général Abdourahamane Tiani de se présenter aux élections à leur issue.
Un scénario qui rappelle étrangement les pratiques des régimes civils renversés, où les dirigeants manipulaient les institutions pour prolonger leur règne sous couvert de légitimité populaire.
Loin de rompre avec ces méthodes, l’Alliance des États du Sahel (AES) semble reproduire les mêmes mécanismes, à ceci près qu’aujourd’hui, les militaires détiennent le pouvoir des armes et n’hésitent pas à réprimer les voix dissidentes.
Dans ce contexte, une question se pose : où va réellement l’AES et quelles seront ses prochaines étapes ?
Les décisions prises au Niger, le 22 février dernier, s’inscrivent dans une dynamique plus large observée au Mali et au Burkina Faso, où les transitions se prolongent, les élections sont repoussées, et toute contestation est étouffée.
À l’heure où l’AES prétend offrir une alternative à la CEDEAO, les actes posés par ses dirigeants montrent une continuité avec les pratiques qu’ils dénonçaient.
Une alternative… mais vers quoi ?
Née du divorce entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger avec la CEDEAO, l’AES s’est construite sur un double rejet : celui d’un prétendu néocolonialisme économique et politique, et celui d’une gouvernance régionale jugée inefficace et inféodée aux intérêts occidentaux.
L’ambition affichée est claire : une intégration plus forte entre les trois États et une lutte accrue contre l’insécurité.
Cependant, les premiers actes posés interrogent. Si la CEDEAO est critiquée pour son manque de réactivité et ses erreurs stratégiques, l’AES semble reproduire les mêmes travers, avec une concentration du pouvoir entre les mains de dirigeants militaires et une dérive autoritaire grandissante.
Militarisation et culte du pouvoir : une impasse prévisible ?
Le discours officiel met en ilavant la sécurisation des territoires, mais dans les faits, on observe une consolidation du pouvoir militaire.
Au Niger, les Assises nationales, qui se sont déroulées entre le 15 et le 22 février, ont proposé une transition de cinq ans renouvelable, où le général Abdourahamane Tiani pourrait se présenter aux prochaines élections à l’issue de cette période.
Ce scénario rappelle les stratégies des anciens régimes civils qui utilisaient des prétextes sécuritaires ou économiques pour prolonger leur pouvoir.
Le Mali et le Burkina Faso suivent une trajectoire similaire : des transitions qui se prolongent sans fin claire, des élections sans calendrier précis, et une concentration de pouvoir entre les mains de l’armée.
Si dans les années 1980 et 1990, il était courant de voir des chefs d’État en treillis militaire et pistolet à la ceinture, aujourd’hui, l’image d’un pouvoir militaire omniprésent évoque un retour en arrière plutôt qu’un progrès.
Plus inquiétant encore, toute voix dissidente est réprimée, et ceux qui osent évoquer un retour à l’ordre constitutionnel sont systématiquement accusés de trahison.
Des Assises nationales qui valident un pouvoir prolongé
Les Assises nationales organisées au Niger, ressemblent en bien de points, à celles du Burkina Faso et du Mali.
Au Burkina Faso, les forces vives, favorables à la junte ont décidé d’une prolongation de la transition pour cinq ans.
La situation politique du pays a été renforcée par un statut spécial pour le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré.
Aucun obstacle ne se pose désormais à ce dernier, qui pourra participer aux élections à l'issue de la transition, tout comme au Niger et au Mali.
Le discours officiel justifie cette prolongation par des impératifs de stabilité et de lutte contre le terrorisme.
Mais la réalité est que ces méthodes ne sont pas nouvelles : autrefois, c’étaient des dirigeants civils qui usaient de prétextes économiques ou sécuritaires pour s’éterniser au pouvoir.
Aujourd’hui, ce sont des militaires qui le font, avec la force des armes et la répression accrue.
Autopromotion au sein des régimes militaires
La tendance à l'autopromotion au sein des régimes militaires est également manifeste.
Au Mali, le colonel Assimi Goïta, président de la transition, a été promu au grade de général d'armée à titre exceptionnel lors du conseil des ministres du 16 octobre 2024.

Cette promotion, la plus élevée dans la hiérarchie militaire malienne, a été accompagnée de l'élévation au grade de général de plusieurs de ses proches collaborateurs, consolidant ainsi leur emprise sur les structures de pouvoir.
Au Niger, le général de brigade Abdourahamane Tiani, a vu les participants aux Assises nationales proposer, le 20 février 2025, son élévation au grade de général d'armée.

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